Une épidémie de typhus éradiquée à Rochefort au XVIIIe siècle
La pandémie liée au coronavirus que nous connaissons actuellement n’est bien sûr pas la première épidémie qui a frappé notre pays. Citons de mémoire la Grande peste qui a sévi au Moyen-Age et qui a fait 25 millions de victimes, soit près d’un tiers des Européens, et la Grippe espagnole, apparue à l’issue de la première guerre mondiale, et qui a fait de 20 à 50 millions de morts selon l’Institut Pasteur. Ou encore, plus près de nous, l’épidémie de variole qui n’a été officiellement éradiquée, grâce à la vaccination, qu’en 1980.
Une autre de ces épidémies, celle du typhus, a pu être jugulée, au XVIIIème siècle, à Rochefort, grâce à l’action déterminante de Charles-Claude de Ruis Embito. Né à Port-Louis, membre de l’Académie de marine, Charles-Claude de Ruis-Embito a été intendant de la Marine à Rochefort de 1757 à 1770. C’est l’année de sa prise de fonction qu’il a participé à la gestion d’une épidémie de typhus et qu’il a évité l’extension de la maladie à la ville de Rochefort. Au même moment, cette épidémie touchait la Bretagne. Ayant franchi l’Atlantique et arrivée dans notre province via le port de Brest, elle y fit plus de 10 000 morts.
Le 5 septembre 1755, trois vaisseaux viennent mouiller à l’Île d’Aix, en provenance du Canada, avec, à leur bord, de nombreux malades atteints du typhus. Ruis-Embito décide alors de mettre les malades à l’isolement afin d’éviter que la maladie, fortement contagieuse, ne se répande. L’intendant fait débarquer les malades à l’île d’Aix où avaient été louées des maisons particulières pour servir de dispensaire à 300 malades, avec des consignes strictes d’isolement. Il envoie également 500 malades dans un ancien hôpital réaménagé dans l’île d’Oléron. De plus, il réorganise les structures sanitaires dans la ville de Rochefort pour pouvoir accueillir environ 1 300 malades supplémentaires. Toutes ces précautions réduiront notablement l’extension des épidémies vers la ville. En définitive, l’épidémie provoquera le décès de 500 personnes dont seulement vingt dans la population civile de Rochefort.
C’est ainsi que grâce à la clairvoyance d’un intendant de marine, capable et qui a su prendre à temps les précautions qui s’imposaient, cette épidémie de typhus a pu être jugulée en Charente-Maritime.
Ce fait a été dûment remarqué par Tugdual de Langlais, historien habitant dans la commune de Saint-Armel, au bord du Golfe du Morbihan, et lointain descendant de Charles-Claude de Ruis-Embito. Il se plaît à comparer la situation qu’a dû affronter son ancêtre à celle actuelle que nous connaissons avec la pandémie liée au coronavirus, déplorant que les leçons du passé n’aient pas été retenues de nos jours.
Hubert de Quillacq
RUIS-EMBITO de LA CHESNARDIЀRE (de) Charles Claude Administrateur de la Marine Né en 1705 à Port-Louis (Morbihan). Décédé le 29 mai 1776 à Brest (Finistère).
Ascendance : Fils de Charles de RUIS-EMBITO de LA CHESNARDIЀRE (?-1743), lieutenant de vaisseau le 1er novembre 1705, et d’Anne-Marie de BARILLI.
Carrière :
Commis de marine à la Cour le 1er janvier 1720.
Petit commissaire de la Marine le 1er janvier 1724,
Commissaire ordinaire de la Marine le 18 juillet 1729,
Contrôleur de la Marine le 1er octobre 1745,
Commissaire général de la Marine le 15 octobre 1751,
Intendant de la Marine le 12 juin 1757.
Il est affecté au port de Brest le 1er janvier 1724.
En 1728, il est chargé de l’inspection des bois de Lorraine, mission qu’il remplit jusqu’au 1er juillet 1732.
Le 1er juillet 1732, il est affecté à Rochefort avec le grade de commissaire ordinaire, puis de contrôleur à compter du 1er octobre 1745, puis de commissaire général dans ce même port à partir du 15 octobre 1751.
En 1751, il est qualifié de « Remply de sentimens et de zele, sçachant à fond le détail des bois et celuy des forges ; malheureusement accoutumé à tout faire par luy-mesme, ce qui l’empesche d’expedier beaucoup d’affaires ».
Le 1er janvier 1755, il est chargé d’exercer les fonctions d’ordonnateur par intérim de la Marine à Rochefort. Il est promu intendant de la Marine à Rochefort le 12 juin 1757, puis à Brest le 1er décembre 1770.
Il est nommé conseiller d’État le 1er juillet 1775.
Société d’appartenance : Membre ordinaire de l’Académie de Marine le 31 août 1752. Membre honoraire de l’Académie royale de Marine le 24 avril 1769.
(Source :Doneaud Du Plan (Alfred), Histoire de l’Académie de Marine, Paris, Berger-Levrault, 1878.)